La justice belge vient de renvoyer un homme victime de vols à sa propre responsabilité. La raison : il a affiché des signes extérieures de richesse dans une zone très touchée par le chômage.
Il n'est «peut-être pas raisonnable» d'afficher «ostensiblement sa prospérité dans une région sinistrée comme Charleroi». C'est ce qu'a estimé un juge belge statuant sur le cas d'un homme d'affaires, Laurent F., victime de plusieurs cambriolages avec violences. Cet homme et sa famille se sont établis en 1998 dans une maison bourgeoise située dans un quartier défavorisé de Charleroi, au coeur de l'ex-bassin industriel wallon. Afin de rénover l'édifice, le père de famille bénéficie d'une prime de 6.000 euros fournie par la Région avec, pour condition, l'obligation d'habiter la propriété. Mais une fois réhabilitée, la belle demeure attire les voleurs. En 2001, l'homme est victime d'un car-jacking. La BMW volée est retrouvée puis dérobée une seconde fois lors d'un cambriolage. En 2006, la famille est braquée à son domicile et menacée avec des armes à feu. Laurent F. est emmené à bord de sa Jaguar et abandonné dans une zone industrielle, vêtu uniquement d'un pyjama.
«Comme si à Charleroi, il fallait rouler en Trabant»
La famille décide alors de déménager et s'installe cette fois dans la très prospère province du Brabant wallon. Ce faisant, la famille ne respecte plus l'obligation d'habiter la maison rénovée. La Région réclame donc le remboursement de la prime, ce que Laurent F. refuse. L'affaire se retrouve devant le tribunal civil de Charleroi, qui vient de donner raison aux autorités régionales en estimant que ces agressions «ne peuvent être considérées comme imprévisibles ou exceptionnelles» et ne constituent donc pas un «cas de force majeure» justifiant un déménagement anticipé.
Plus que le jugement et la demande de remboursement, c'est la justification qui étonne. La juge Geneviève Denisty estime qu' «il n'est peut-être pas raisonnable» d'attirer l'attention en circulant en Jaguar et en vivant dans une belle maison, «dans une région sinistrée comme l'est celle de Charleroi».
L'avocat de l'homme d'affaires, Me Frédéric Clément de Clety, a d'ores et déjà annoncé qu'il allait faire appel. «Comme si à Charleroi, il fallait rouler en Trabant, se promener en training [des baskets] ou habiter une maison délabrée, pour être en sécurité ou être irréprochable», a-t-il déclaré. En Belgique, cette histoire choque. Le journal Le Soir estime que «la justice banalise la violence à Charleroi». La décision suscite en particulier des commentaires sur les sites des journaux flamands, où certains voient dans cette affaire la « maffiaïsation » de la Walonie.
This comment has been removed by a blog administrator.
ReplyDelete