Monday, July 19, 2010

Etre Pakistanais, c’est être musulman

A l’instar d’Israël, le Pakistan a été créé pour une communauté religieuse: les musulmans du sous-continent. Le Coran est omniprésent.

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Au Pakistan, la religion est présente partout et tout le temps. Tout ou presque est certifié "hallal" (conforme à la religion), même le dentifrice. Pour se dire bonjour, les Pakistanais n’ont qu’une seule expression: "Asalaam aleikum", "la paix soit sur toi". C’est la façon qu’ont tous les musulmans de se saluer. N’importe quelle cérémonie, que ce soit un mariage, une remise de diplômes, même une conférence universitaire, débute par une lecture du Coran.

Quand on voyage à bord d’un avion de la compagnie aérienne pakistanaise ou dans un bus, le pilote ou le chauffeur ne part jamais avant de réciter une prière pour que le voyage se déroule sans incident. Si vous avez un rendez-vous, il arrive que l’entretien soit interrompu. "Veuillez m’excuser. C’est l’heure de la prière". Votre interlocuteur disparaît alors dans sa salle de bain pour ses ablutions, revient, étale un tapis en direction de la Mecque et se courbe devant Allah.

Cette identité islamique trouve ses origines dans la fondation du Pakistan. Avant 1947, le pays fait partie des Indes britanniques. Les leaders du mouvement indépendantiste indien, Gandhi entre autres, pensent qu’hindous et musulmans peuvent vivre ensemble et prônent un Etat unique. Mais certains musulmans n’en sont pas convaincus. Parmi eux, Mohammed Ali Jinnah. Cet avocat estime que ses coreligionnaires ne peuvent pas s’intégrer dans une société où les hindous sont majoritaires et il réclame la création d’un pays séparé. Quand les Anglais quittent la région en août 1947, deux Etats apparaissent : le Pakistan, à majorité musulmane, et l’Inde, à majorité hindoue.

La Constitution pakistanaise promulguée en 1956 établit une République islamique et affirme que toute loi doit être conforme aux enseignements du Coran. Car en créant le Pakistan, les dirigeants du pays savent qu’ils sont à la tête d’une myriade d’ethnies, chacune parlant sa langue. Il y a les Penjabis, concentrés dans l’est du pays; les Sindhis, installés dans la province du Sindh (sud); les Pachtounes, qui peuplent le nord-ouest; et enfin les Baloutches, qui vivent dans l’ouest, à la frontière avec l’Iran. Sans oublier les Bengalis, qui firent sécession en 1971 pour donner naissance au Bangladesh.

Certaines de ces ethnies, comme les Pachtounes, ont demandé leur indépendance en 1947. Et aujourd’hui encore les Baloutches réclament leur Etat. Pour neutraliser ces revendications et façonner une identité commune, l’armée et l’administration, dominée par les Penjabis, ont mis l’accent sur l’islam plutôt que sur les particularismes ethniques.

"Foi, unité, discipline", clame la devise nationale. Mais les autorités n’ont jamais précisé de quelle branche de l’islam elles se revendiquent. Ainsi, elles ont laissé le champ libre aux partis islamistes qui se posent en gardien de la foi et donc de l’identité nationale. Le plus important d’entre eux, le Jamaat islami, affirme que le Pakistan est un Etat sunnite, où les autres communautés religieuses n’ont pas droit de cité.

Les affrontements entre chiites et sunnites ont commencé dès les années 50 et cette guerre sectaire perdure. Des groupes djihadistes comme le Sipah-e-Sahaba Pakistan (SSP) ou le Lashkar-e-Jangvi n’hésitent pas, au nom de cette vision d’un Pakistan sunnite, à assassiner des chiites et des chrétiens. En août 2009, les chrétiens d’un village de l’est du pays avaient été attaqués par des hommes du SSP, qui les accusaient d’avoir déchiré des pages du Coran en public. Le 29 mai dernier, un commando terroriste a pris d’assaut deux mosquées d’une minorité musulmane non-sunnite, les Ahmadis, tirant à l’arme automatique sur les fidèles assemblés pour la prière. Bilan : 42 morts.

Ces épisodes ne sont que les derniers d’une guerre sans fin. L’identité nationale pakistanaise est loin d’être achevée.


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