Sunday, March 28, 2010

Grigori Perelman : Un brillant savant russe


Un million de dollars? Non merci...




Physiquement, il ressemble à Raspoutine. Intellectuellement, il se situe dans la catégorie des génies. Et comme tous ces êtres d’exception, il se comporte de manière exceptionnelle. C’est ainsi que Grigori Perelman vient de refuser le 18 mars dernier un million de dollars pour avoir résolu l’une des grandes énigmes mathématiques du XX e siècle. Il a également claqué la porte à la télévision. Donc tout naturellement, un homme qui n’aime ni l’argent ni les honneurs passe pour un fou. Un fou génial, mais un fou tout de même.

Mais qu’a donc fait cet énergumène russe de 44 ans pour attirer autant de monde sur son cas ? D’abord il a reçu la médaille Fields en 2006, considérée comme le Nobel des mathématiques, pour des travaux publiés sur internet en 2002 et 2003… Ses pairs ont en effet mis deux ans pour vérifier les trente-neuf pages de sa résolution d’un problème posé par Henri Poincaré en 1904, conjecture sur laquelle les plus grands mathématiciens du XX e siècle se sont usés les neurones. À celui qui parviendrait à trouver la solution à ce qu’il a recensé comme l’un des sept problèmes du « prix du millénaire », l’Institut de Mathématiques Clay avait promis le fameux million de dollars. À un journaliste qui a fini par le joindre au téléphone après la parution du communiqué indiquant sa découverte, Perelman a répondu « vous me dérangez, je suis en train de ramasser des champignons. »

Perelman est un esprit qui plane ailleurs. Il en vient et il y retourne souvent. Alors forcément, on ne le comprend pas. Les voisins de son petit appartement vétuste de Saint-Pétersbourg où il vit reclus depuis quatre ans moquent sa mise négligée. « Il porte toujours la même veste et le même pantalon miteux. Il ne se coupe jamais les ongles ou la barbe. Quand il marche, il fixe le sol au lieu de regarder autour de lui. » Certains affirment qu’il n’a presque pas de meubles, d’autres trouvent qu’il ne dit pas bonjour. C’est vrai que nous sommes à des années-lumière des préoccupations médiatiques du moment.

La conjecture de Poincaré consiste à déterminer si une forme quelconque peut constituer une sphère à trois dimensions… À vos copies ! Vous avez un bon siècle pour répondre. Pour l’Institut Clay, ce problème très complexe de topologie constitue l’un des « sept problèmes les plus recherchés du millénaire ». D’où ce « Prix du Millénaire » et son montant qui ferait tourner bien des têtes. Mais pas celle de Grigori Perelman.

À l’époque de l’argent roi, l’intelligence n’est pas reine. Ou alors, cette intelligence doit accepter la monnaie d’échange, c’est-à-dire la gloire, la célébrité. De cela Perelman n’a cure. Lorsqu’il a reçu la médaille Fields, le barbu a refusé qu’on le photographie et n’a pas ouvert sa porte aux journalistes, ne voulant pas, selon ses termes être exposé comme un animal de foire.  « Je ne suis pas un héros de mathématiques. Je ne suis même pas un génie, c'est pour cela que je ne veux pas que tout le monde me regarde».

Discret. Le mot est faible pour qualifier ce savant qui publie ses recherches gratuitement sur la toile. Depuis quelques années on murmure dans la communauté des mathématiciens qu’il pourrait bien être un génie. Visiblement, sa notoriété le dérange. En 2005, il démissionne de son poste de chercheur à l’Institut Steklov où il travaillait depuis quinze ans. L’année suivante, l’Union mathématique internationale (IMU) lui décerne la médaille Fields qu’il n’ira jamais chercher. Aux dernières nouvelles, Perelman qui vit seul avec sa vieille mère aurait cessé toutes recherches…

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